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Nous sommes arrivés à Hué vers 21h. Les enfants étaient épuisés.
Viet ne nous avait pas accompagnés pour nous éviter d'avoir à ajouter son billet d'avion aux frais que nous lui devions. Il nous a confiés à un de ses collègues, M. Dung (prononcez "Zung"), qui nous attendait à la sortie de l'aéroport.
M. Dung nous a conduits sur le parking à la recherche du minibus qui devait nous transporter à l'hôtel. Hélas, le véhicule était introuvable : il avait été victime d'une crevaison. La situation s'est arrangée rapidement, mais le temps nous a paru long, sur le parking d'une ville inconnue avec les enfants au bout de leurs forces. Je crois que M. Dung a eu peur de nous faire mauvaise impression, mais nous ne lui en avons bien sûr pas voulu pour ce contretemps absolument impossible à prévoir !
L'hôtel où nous avons dormi à Hué était vraiment superbe. C'était la première fois que je n'avais rien à redire. Même la salle de bains était nickel. Seule ombre au tableau : nous sommes arrivés tard pour partir tôt le lendemain et nous n'avons pas eu le temps d'en profiter !
Après un petit déjeuner gargantuesque et excellent pris dans une salle surplombant la ville, nous nous sommes rassemblés et avons pris la direction de la rivière des parfums pour une croisière de 24h.
L'embarcadère était situé au pied de la pagode de la Dame Céleste (photo Wikimedia à gauche) que nous avons visitée avant de monter à bord. Dans un Vietnam ravagé par les guerres successives, les bâtiments anciens sont rares, et la visite de cette pagode m'a émue. Un petit monastère est situé derrière la pagode. Nous avons visité le temple où Hobbit a imité les bouddhistes pour prier (il a demandé au Bouddha de le ramener chez lui, mais ça n'a pas marché, comme c'est bizarre !). Les jardins du monastère sont d'une harmonie reposante. Dans un bassin de nénuphars, les enfants m'ont demandé la différence avec le lotus : j'ai pu leur parler de l'effet lotus et introduire certaines notions scientifiques (j'ai pas l'habitude de donner des leçons de sciences aux petits, et j'ai kiffé grave !).
La visite terminée, nous avons rejoint le sampan sur lequel nous allions passer 24h. L'embarcation, qui devait circuler sur la rivière des parfums, était bien sûr beaucoup plus petite que la jonque que nous avions occupée sur la baie d'Halong. Une petite terrasse précédait une salle commune où s'alignaient, le long des murs, six espaces avec des bancs et des chaises transformables en lits surplombés par six autres lits. Au fond de la salle, deux salles de bains étaient disponibles. A l'arrière du bateau et au-dessus de notre salle, des espaces étaient prévus pour le personnel de bord.
Le temps de nous installer, nous avons eu droit à un petit repas constitué d'une soupe (ah non, pas encore ! pas par cette chaleur !) de nouilles lyophisiées (beuh...) suivies d'un succulent ragoût (ça fait un peu bizarre de manger un ragoût avec des patates et des carottes au Vietnam, mais c'était bon, alors...).
Personnellement, j'adore les paysages de rivières. Quand on roule sur les routes de France, quand on traverse un cours d'eau, je jette toujours un oeil charmé sur le serpentin argenté bordé de végétation ou de cailloux. Alors imaginez mon plaisir lorsque j'ai pu naviguer sur la rivière des Parfums, contemplant les bananiers, les roseaux, les jacinthes d'eau (ouais, bon, je fais ma maligne, mais c'est Tata qui m'a dit que c'en était, moi j'y connais rien !)...
Nous nous sommes arrêtés pour faire une balade à vélo. Devinez qui c'est le boulet qui ne sait pas faire de vélo ? Jeune, ça me terrorisait, adulte, personne n'a eu la patience de m'apprendre. Du coup, ben, j'ai dû rester sur le bateau. Une des petites n'a pas trouvé de vélo à sa taille et a préféré rester avec moi plutôt que se tanner l'arrière-train sur le porte-bagage de son père. Moi, ça me faisait plaisir de ne pas être seule, mais j'étais sur tout transportée à l'idée de passer un peu de temps avec cette petite puce que j'adore (les autres aussi, hein, j'ai pas de préférence !).
Nous sommes donc restées sur le bateau. Le personnel du bateau a mis en place sur le pont des chaises pour nous et nous a servi un thé exquis. Je les ai entendus nous appeler entre eux "ladies" avec une certaine affection, et ça m'a fait un drôle d'effet. Nous sommes restées à causer en contemplant les paysages fantastiques. Je n'ai même pas pensé à prendre de photos tellement j'étais bien.
Les autres sont revenus rouges comme des tomates d'avoir pédalé sous le soleil brûlant, mais heureux. N'empêche, je n'aurais pas échangé ma place !
Nous sommes descendues du bateau pour aller visiter une fabrique traditionnelle d'estampes avec les autres. On nous a montré comment fabriquer les estampes : on frotte une éponge sur une pierre couverte d'encre, on étale, à l'aide de cette éponge, l'encre sur une sorte de tampon géant, on pose une feuille sur le tampon et on appuie doucement. Nous avons tous essayé, les enfants en premier, d'imprimer nos signes chinois. Les ouvriers nous ont fourni des rouleaux de bambou pour ranger nos "oeuvres". Je ne suis pas fan des motifs proposés, mais l'animation était vraiment sympathique.
En retournant sur le bateau, mon hobbit a glissé et a mis un pied dans l'eau de la rivière. Rien de grave, pour nous, il suffisait de retirer chaussettes et chaussures pour les faire sécher, ce qui serait rapide vu la chaleur. J'ai néanmoins été surprise de voir M. Dung se précipiter vers mon petit, lui retirer ses chaussures en quatrième vitesse, le prendre dans ses bras pour l'emporter dans la salle de bains et lui rincer les pieds. L'eau n'est pas propre, il faut rincer vite parce que des fois, ça pique, m'a-t-il expliqué avec flegme. Ca casse un peu le charme.
Nous avons continué notre croisière sur la rivière. J'ai profité de ce moment de calme pour écrire des cartes postales que j'ai perdues par la suite !
Quand Tata était petite, Mamie l'avait initiée à un jeu de cartes vietnamien, le tam cuc. Viet nous avait trouvé des cartes sur le marché de Hai Phong, ce qui n'était pas simple car le jeu est démodé au Vietnam. Mamie nous avait réappris à jouer sur la baie d'Halong. Tata, Sam et les filles étaient devenus fous de ce jeu qui dose parfaitement le hasard et la stratégie. M. Dung les a vus jouer avec étonnement : il y jouait quand il était petit mais ne se rappelait plus des règles. Tata s'est fait un plaisir de les lui rappeler et M. Dung s'est joint aux joueurs avec un enthousiasme communicatif.
Nous nous sommes finalement arrêtés pour la nuit le long de la berge. Pendant que les sportifs partaient faire un second tour à vélo, je suis restée sur le sampan avec mon Hobbit qui faisaient la sieste et les deux petites qui n'avaient pu rester avec moi la fois précédente. Chacune son tour ! Le personnel de bord nous a fait rentrer dans la salle commune où ils venaient d'allumer la climatisation. Ce moment de bonheur avec les petits anges a été de courte durée. Le Hobbit s'est réveillé gentiment et les autres sont revenus. Nous sommes descendus passer la soirée sur la terrasse d'un restaurant.
Nous avons été accueillis sur une rotonde où étaient alignés des bacs d'eau brûlante parfumée aux plantes médicinales et des chaises. Nous nous sommes assis les pieds dans l'eau et un masseur aveugle nous a massé les pieds. Je suis très chatouilleuse des pieds, et les autres ont bien rigolé en voyant mes grimaces ! Le massage a fini par les épaules, et là, c'est le bonheur.
Nous avons ensuite eu droit à un cours de cuisine. Tata est un cordon-bleu, j'apprends à cuisiner, le Hobbit et une de ses cousines se destinent à une carrière de cuisiniers : nous attendions ce moment avec impatience. Nous n'avons pas été déçus. Nous avons commencé par rouler des nems de Hué (photo ci-contre) : pas trop difficile, même les petits ont réussi avec brio (comme ils étaient fiers !). Des crêpes vietnamiennes ont suivi, ce qui demande un peu plus de technique. Nous avons terminé le cours par une salade de figues vertes étonnante. Le tout avec la traduction et les explications de M. Dung qui possède en français un vocabulaire dont je suis admirative.
Le meilleur moment de la soirée a évidemment été celui où nous avons dégusté ce que nous avions cuisiné devant le soleil couchant sur la rivière. Les plats étaient tout de même passés en cuisine pour les finitions. Un tout petit chaton s'ébattait près de nous, pour la plus grande joie des enfants qui ont vite abandonné la table pour le poursuivre.
Nous sommes enfin retrounés à bord du sampan pour dormir. Le personnel de bord avait préparé les couchettes que nous nous sommes réparties. Quelle aventure, pour les enfants, de dormir tous ensemble sur des couchettes aménagées sur un bateau !
Au cours de la nuit, j'ai été réveillée par mon téléphone. Je n'ai pas pu répondre mais j'ai pu voir un numéro français s'afficher. J'ai calculé qu'il était minuit à Paris et je me suis étonnée. A mon retour, j'apprendrais que ma voisine avait entendu du bruit et s'était inquiétée pour rien. Peu importe, il était cinq heures au Vietnam, et j'ai discrètement poussé un rideau pour contempler le lever de soleil sur la rivière. Inoubliable !
Au matin, pendant que nous prenions un petit déjeuner conclu, à notre grande surprise, par des choux à la crème dont la recette était vraisemblablement héritée des colons, nous avons fait demi-tour pour regagner l'embarcadère. J'ai dévoré des yeux une dernière fois la rivière des Parfums et je me suis laissée embarquer dans le minibus, sous une chaleur écrasante, pour visiter les monuments de Hué.
Hué est l'ancienne capitale des empereurs du Vietnam. La Cité Impériale, classée par l'UNESCO, a été bâtie par l'empereur Gia Long, fondateur de la dynastie des Nguyen. Elle ressemble fortement à la Cité Interdite de Pékin, mais elle a malheureusement été en grande partie détruite au cours des guerres du XXème siècle. La restauration est en cours.
La porte passée, un chemin bordé de bassins remplis de lotus mène à la salle de réception de l'Empereur. A l'intérieur, un trône sublime semble attendre le royal séant. M. Dung nous a expliqué l'architecture et le choix des couleurs : la pièce est décorée de jaune et de rouge, comme le drapeau vietnamien, mais ces couleurs n'ont pas la même signification. Le jaune impérial est symbole de richesse et de pouvoir, le jaune du drapeau est celui de la peau du peuple vietnamien. Le rouge impérial est symbole de bonheur, le rouge communiste rappelle le sang versé pendant la Révolution. Il nous a rappelé, aussi, l'existence du jaune colonial. Ces simples couleurs peuvent avoir tant de significations différentes !
Dans la Cité Impériale, des pavillons restaurés alternent avec des espaces vides voire des ruines calcinées. Ce que l'ont voit (le théâtre, les allées couvertes...) donne envie de revenir dans 30 ans, quand la restauration sera achevée !
L'un des espaces les mieux restaurés est le palais de la Reine-Mère (ci-contre). Un vaste espace dallé ornementé de bonzaïs donne sur un petit palais jaune. Sur la droite, un espace de détente est prévu pour la mère de l'Empereur. Là encore, un bassin rempli de lotus se déploie avec grâce (les filles étaient frustrées : un bassin, par cette chaleur, c'est une bonne idée, mais rien n'est prévu pour s'y baigner !). Un petit pavillon de bois s'élève à côté du bassin : c'est là, nous a informé M. Dung, que la Reine-Mère jouait aux cartes (tiens, comme nous !) avec ses suivantes. Nous avons pénétré dans le pavillon, des étoiles dans les yeux, pour y trouver une paroi de bois sculpté incrusté d'ivoire et de nacre absolument splendide. A-t-il été soigneusement restauré ? A-t-il traversé les âges ? Impossible de le savoir.
Moins glamour, les enfants sont passés aux toilettes ensemble et mon Hobbit a été choqué par leur état. "C'est la faute de l'Empereur !" a-t-il déclaré, outré. De la graine de démocrate, mon petit chou !
La visite s'est terminée trop vite à mon goût, mais il faut bien partir, on avait encore des choses à voir avant le déjeuner !
Parmi les empereurs de la dynastie Nguyen, l'empereur Tu Duc a laissé un souvenir très fort. Il a régné longtemps et a vu arriver les colons français. Impuissant face à eux, il s'est réfugié dans le rêve et la poésie. Nous avons visité le palais d'été où il oubliait les malheurs de son règne et qui est devenu son mausolée.
Là encore s'étend un bassin de lotus (photo Wikimedia, à droite). Alors que M. Dung nous racontait comment Tu Duc se faisait faire un thé de lotus avec la rosée prélevée sur les feuilles, les filles ont expérimenté l'effet lotus en jetant de l'eau sur la plante. Je ne suis pas peu fière de mes petites scientifiques !
Le mausolée est un vaste complexe où l'on trouve l'habitation devenue temple et une tombe vide, l'Empereur étant enterré quelque part dans le palais, mais personne ne sait où. Une grande stèle raconte le règne de Tu Duc, avec une certaine objectivité : d'après M. Dung, Tu Duc souhaitait laisser à l'histoire le soin de le juger. Il me plait bien, cet Empereur. J'aurais souhaité passer des heures à parcourir son domaine, voir ce qu'il a vu, rêver sous les arbres qui l'ont vu passer, fouler les pierres qu'il a effleurées, mais le temps manquait, encore, et la chaleur assommait le reste du groupe.
A notre arrivée au restaurant où nous devions déjeuner, Tata a prié M. Dung d'intervenir auprès de la cuisine pour qu'on ne nous serve pas l'incontournable soupe qui débute tous les repas : il faisait trop chaud ! M. Dung s'est exécuté avec zèle : le cuisine nous a fait grâce de la soupe et l'a remplacée par du rab de nems, alléluïa. En dessert, nous avons pu découvrir les ramboutans, une merveille.
Ce repas a été l'occasion pour Sam de découvrir les "o mai". Mamie et Tata en sont friandes et M. Dung nous avait entendu en parler : il nous en a ramené un paquet. Il s'agit de fruits (prunes d'après Mamie, abricots d'après Wikipedia, moi je crois ma Mamie, hein !) séchés et salés. Nous sommes nombreux à détester ça, et Sam a voulu tester. Il a ainsi pu nous faire profiter de sa connaissance parfaite du champ lexical alimentaire. Je crois que "immonde" est le qualificatif qui a le plus fédéré les avis.
Nous avons passé l'après-midi dans le minibus (climatisé, c'est un détail qui a une énorme importance !) pour rejoindre Hoi An par le col des Nuages et Danang. Les paysages étaient enchanteurs, et nous avons croisé de nombreuses plages sublimes quoique dépeuplées par la chaleur.
Hoi An est une ville qui a perdu son importance avant les guerres. Elle a donc été épargnée par les destructions et a conservé ses maisons d'architecture historique. La ville est classée par l'UNESCO.
A notre arrivée nous avons visité une fabrique de soie. Les enfants ont pu découvrir les vers à soie, la fabrication du fil, du tissu... Et la boutique valait le détour.
Nous avons ensuite déambulé jusqu'au crépuscule dans les rues de Hoi An , visité une maison vieille de 200 ans, traversé le pont couvert (photo Wikimedia, à droite)... Je me suis sentie un peu comme à Disneyland : un décor enchanteur, et des boutiques partout, toutes avec les mêmes articles emblématiques du lieu.
M. Dung nous a conduit dans un restaurant sympatoche et nous y a fait ses adieux : avec notre plein accord et nos encouragements, il rentrait chez lui pour passer son permis de conduire le lendemain. Je ne sais pas s'il l'a eu, mais je le lui souhaite de tout coeur. Nous sommes rentrés tôt, trop tôt pour profiter de la nuit dans Hoi An éclairée par des milliers de lampions, mais les enfants n'en pouvaient plus !
L'hôtel que nous avons occupé à Hoi An était simplement parfait. Après deux semaines de visites non stop, une nuit suivie d'une matinée de détente dans un hôtel assez luxueux, c'était trop tentant. Nous avons profité d'un petit déjeuner délicieux (avec plein de plats asiatiques, j'aime mieux ça qu'une tartine de beurre !), de la piscine et du salon de massage.
Nous sommes partis peu après prendre un repas au pas de course pour ne pas rater notre avion à Danang. Direction Hanoi !
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