Préjugés classiques

Voici un petit florilège de préjugés sur le féminisme et les féministes, glanés au hasard de mes conversations personnelles et sur le forum féministe auquel je participe (merci aux membres pour m'avoir donné pas mal d'idées et aux trolls pour m'avoir donné l'occasion de les nourrir).
J'ai dénoncé les mêmes préjugés dans mon billet Le dialogue lambda. Il y a également un article très sympa de Maïa Mazaurette sur le sujet.
Si toi, ami lecteur, reconnais ci-dessous une phrase que tu as coutume de penser, rassure-toi, c'est normal : j'ai rencontré si peu de personnes exemptes de préjugés contre les féministes que je m'abstiendrai de te traiter de gros connard de macho inculte et complexé du zgueg.

  • Les féministes veulent que les femmes soient supérieures aux hommes.
    Le féminisme est un machisme à l'envers.
Nous serions ainsi des hystériques, aigries, haineuses, incapables de raisonner.
"On ne naît pas femme, on le devient" écrivait Simone de Beauvoir. Les femmes n'ont pas ces qualités intrinsèques qu'on leur prête généralement pour dire que le monde irait mieux si elles en tenaient les rênes et les hommes n'ont pas des défauts terribles qui mène le monde à sa perte (c'est la notion de genre expliquée ici et ). Nous ne nous considérons donc pas comme plus à même de diriger le monde. Nous réclamons simplement l'égalité.
Il peut arriver, néanmoins, que des gynarchistes ou des personnes misandres se réclament du féminisme, à tort : aucun des auteurs féministes reconnus ne suit cette tendance.

  • Les féministes détestent les hommes.
Nous ne détestons ni ne méprisons pas les hommes en général. Nous nous battons pour que les femmes soient considérées comme des individus avant d'être des femmes. Les hommes aussi, donc, sont des individus avant d'être des hommes, nous ne les voyons pas à travers le prisme du préjugé.
Il faut reconnaître, cependant, que des privilèges sont accordés aux hommes dans la société. Tous n'en profitent pas, évidemment, mais ces privilèges leur donnent quelquefois un point de vue différent du nôtre. Il convient d'en tenir compte lors de nos échanges.
Personnellement, je dois dire que je suis devenue féministe lorsque j'ai cessé de me méfier des hommes en général. S'ils étaient, comme je l'ai cru à une époque de ma vie, tous des porcs, pourquoi lutter ?

  • Les féministes voient toutes les femmes comme des victimes et tous les hommes comme des agresseurs potentiels.
    Le féminisme est victimaire.
Il ne faut pas confondre le groupe et l'individu. Nous dénonçons la violence exercée contre les femmes. Ca ne veut pas dire qu'elle est systématique. Ca veut dire qu'il y a une tendance sociale à la tolérance envers ces violences. La société permet aux hommes d'exercer une domination sur les femmes, certes, mais tous n'utilisent pas cet outil mis gratuitement à leur disposition, loin de là.
  • Les féministes n'aiment pas le sexe. Elles sont prudes.
Les féministes, pourtant, s'occupent volontiers de sexe. Récemment, Osez le Féminisme avait fait le buzz avec sa campagne Osez de Clito. Ce que nous refusons, c'est cette réduction de la sexualité au pilonnage qui est la norme dans la pornographie mainstream. Nous refusons d'être des objets sexuels, nous refusons le viol, et nous revendiquons notre droit au plaisir. Les différents courants féministes sur la prostitution ont tous le même objectif : permettre aux femmes de disposer librement de leur corps.
  • L'égalité est déjà là, en France, en tout cas. Les féministes font beaucoup de bruit pour rien.
Quand on me dit ça, j'ai toujours envie de répondre "elle a l'air sympa ta planète". 
J'ai relevé pas mal de statistiques qui prouvent qu'en France, c'est pas la joie niveau violences. Pour les inégalités au quotidien, allez faire un tour sur Vie de Meuf. Alors, OK, on a le droit de vote, on a le droit de signer des chèques, c'est énorme, merci les filles. Mais il reste beaucoup à faire.

  • Vous ne vous occupez que de combats d'arrière-garde.
Effectivement, les médias ont plus parlé des actions pour la civilité égalitaire que les nombreuses actions contre le viol et l'excision. Mais c'est pas parce qu'on n'en parle pas qu'elles n'existent pas.
Il est facile, de plus, d'accuser ces combats de futilité. Il s'agit de changer les stéréotypes qui sont permettent des pires violences. Et là, on touche à l'identité des personnes, à la manière dont elles se voient. Ca énerve. Et les médias se précipitent pour exposer ces féministes casse-pieds à la vindicte populaire.
Sur le blog : A tous ceux qui râlent que les féministes ont mieux à faire que faire interdire le "Mademoiselle"

  • Les hommes aussi souffrent du sexisme.
Le féminisme est la lutte anti-sexiste appliquée aux femmes en particulier. L'ampleur des violences que nous subissons montre qu'il y a urgence à protéger les femmes.
Historiquement, la mise au jour des mécanismes permettant de perpétuer ces violences ont permis de décoder les stéréotypes enfermant les deux sexes sur des planètes différentes. Les hommes bénéficient des conclusions tirées par les féministes.
Sur le blog : Ce qu'on m'a appris sur les hommes

  • Vous niez les différences naturelles entre les hommes et les femmes.
Non. Au contraire, nous militons aussi pour une prise en compte adaptée par le corps médical des problèmes spécifiques aux femmes.
Ce que nous nions, c'est que ce qui est généralement accepté comme des différences naturelles le soient. Nous nions qu'une femme soit naturellement douce, maternelle, gentille, futile, dénuée de sens de l'orientation. Nous nions que les hommes soient naturellement violents. La biologie et les résultats des études de genre vont dans notre sens.
Sur le blog : Le mystère féminin

  • Vous voulez uniformiser les sexes. Vous voudriez que les femmes deviennent des hommes.
    Vous êtes liberticides. Vous voulez imposer un mode de vie dont nous ne voulons pas.
Le genre masculin étant généralement plus valorisé que le genre féminin, nous voudrions éradiquer le genre féminin en interdisant le rose et les fleurs. C'est une réponse complètement absurde, n'est-ce pas ?
Non, nous voulons que chacun soit libre de choisir son comportement, qu'il corresponde au genre que la société lui assigne ou non. Nous voulons que les femmes et les hommes soient libres d'adopter une comportement féminin ou masculin quand bon leur semble.Ce n'est donc pas une restriction de la liberté, que nous cherchons, mais une extension. La seule chose que nos revendications imposent est une réflexion sur notre société.
Sur le blog : Féministe et féminine, Libres d'être femmes.

  • Les femmes ont des privilèges dont elles abusent.
Quels privilèges ?
Se faire tenir la porte et être exemptées de porter les choses lourdes ? C'est uniquement parce qu'on est réputées plus faibles physiquement (ce qui est discuté, d'ailleurs). Nous souhaitons être jugées individuellement : pourquoi porter les packs d'eau à la place d'une femme assez forte pour le faire et ne pas exempter de cette tâche un homme faible ?
Obtenir plus souvent la garde des mômes en cas de divorce ? C'est parce que nous sommes réputées être plus maternelles. Or, ce n'est qu'un stéréotype qui nous confine à la sphère privée. Prenez-le, vos mômes, les mecs, si vous faites l'effort de demander la garde, vous l'aurez.
Pouvoir jouer de notre physique pour arriver ? Parce que les hommes, en roulant des mécaniques, ne le font jamais, peut-être ?
Oui, il y a des femmes qui utilisent les stéréotypes à leur avantage. On n'a jamais dit que les femmes étaient toutes des anges. Au contraire, il y a autant de connes que de cons.
Ce que vous appelez des privilèges, rassurez-vous, nous sommes prêtes à y renoncer et même à les dénoncer. Même si ce n'est pas facile. Nous ne voulons pas de privilèges, nous voulons simplement nos droits.




1 commentaire:

  1. "L'ampleur des violences que nous subissons montre qu'il y a urgence à protéger les femmes."... des FéMINICIDES. "...mécanismes permettant de perpétuer ces violences [féminicides] ont permis de décoder les stéréotypes enfermant les deux sexes sur des planètes différentes. Les hommes bénéficient des conclusions tirées par les féministes."

    Malheureusement les théories du genre (qui ont bu à la source de la psychanalyse pénienne (complémentaire du phallus qui cachait son doux repos) tout de même;o) si bien aujourd'hui détournées et contournées, à la fois, pour le bénéfice phallocrate.

    Petit à petit, l'humanisme devenu hominisme (?), ou n'ayant jamais été que cela dans l'aveuglement d'un féminisme égalitaire ? Si bien retournée l'égalité à leur profit qu'ils veulent tout tout tout savoir et avoir.

    Il est d'autant plus urgent de faire reconnaître les féminicides et de monter sans hésiter... le tabou social décisif de ces féminicides. Car combattre en ordre dispersé tant de dégradations, c'est s'épuiser... c'est ce qui est recherché, n'est-ce pas, nous fatiguer !
    Et il ne faut pas dire mais voyons les féminicides sont des homicides car je vous répondrai, mais oui, mais oui tout à fait mais les génocides en sont bien aussi et pourtant vous les mettez au pénal, alors que ce sont destructions de lignées patriarcales et patrilinéaires (ce qui est intolérable dans les deux cas)...
    http://susaufeminicides.blogspot.fr/2012/01/definitions-feminicides.html

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