lundi 13 juin 2011

C'est toi l'champion, Gaston !

Nous avons profité du long week-end pour revoir "La Belle et la Bête" de Disney. C'est un film que j'aime bien depuis sa sortie, quand j'étais une petite fille (les mauvaises langues diront que j'ai pas beaucoup grandi depuis...). Mon hobbit l'aime bien aussi, vu qu'il aime bien les trucs de fille en général.

Le personnage de Belle change un peu des princesses Disney. Elle est jolie, dévouée et gentille, d'accord, mais elle est aussi courageuse, cultivée et intelligente. Bon, ses lectures se bornent à des romans, Belle est une rêveuse, pas une philosophe. N'empêche qu'au moins, elle sait lire, je ne suis pas certaine qu'Aurore puisse en dire autant.
J'aime aussi le fait qu'elle ne se laisse emmerder ni par Gaston ni par la Bête. On pourrait trouver qu'elle est têtue et querelleuse, mais c'est surtout une femme de caractère.
Elle n'a pas peur de sortir seule en pleine forêt et elle n'attend pas qu'on vienne la sauver. Elle vole au secours de son père, et la Bête. Elle s'enfuit seule en pleine nuit du château où elle se sent menacée. Elle lutte contre les loups, avec peu de succès, certes, mais au moins elle ne se couche pas dans la neige en attendant qu'un autre mette une branlée aux bestiaux.

Face à ce personnage étonnant, nous trouvons Gaston. Il a tout pour plaire, celui-là. Dès sa première apparition, il descend un canard : Gaston est un chasseur, un carnivore invétéré qui avouera plus tard, au détour d'une chanson, gober les oeufs par douzaine depuis l'enfance. Il picole. Il dédaigne la connaissance et balance le livre favori de Belle dans une flaque de boue. Pour couronner le tout, il est monstrueusement poilu et fier de l'être (ça pique les yeux).
Gaston est sûr de lui et de son pouvoir de séduction. Il a jeté son dévolu sur Belle, la seule qui le dédaigne. Il est donc dans une logique de conquête plus que de séduction. Pour parvenir à ses fins, tout est bon, même le chantage. Le refus de Belle l'encourage à faire preuve d'une extrême violence. Pour être un homme et retrouver sa virilité, il ressent le besoin de se battre, et de tuer des animaux. Il est possessif, et considère que Belle lui appartient.
Ce qui est glaçant, c'est que son assurance de beauf reçoit l'approbation de la communauté. On l'admire, on l'applaudit. Belle est considérée comme bizarre, Gaston est un homme, un vrai. Comme dit la chanson, "c'est toi l'champion, Gaston !". Ah ouais, c'est un vrai winner, que Disney nous a pondu.

La Bête, au début du film, est un peu dans le même délire viril. Il retient Belle captive, il veut la forcer à dîner avec lui. Mais lui, au contraire de Gaston, accepte de se civiliser, par le contact tendre et respectueux avec les animaux (il nourrit les petits oiseaux avec l'aide de Belle), en se tenant correctement à table, en réapprenant à lire (scène de la version longue), et en retrouvant une hygiène corporelle. L'amour le conduit à libérer Belle : c'est en égaux, et non pas en tant que geôlier et prisonnière, qu'ils pourront finalement s'aimer. Au final, la Bête sacrifie par amour sa chance de redevenir un humain, avant d'épargner la vie de Gaston, lequel est qualifié de "monstre" par Belle. Le monstre est humanisé par ses rapports respectueux avec les autres tandis que l'humain se comportant en mâle dominant devient le véritable monstre.

Ce film m'a donné l'occasion d'aborder un sujet sensible avec mon fils : on ne force pas une fille à passer un moment romantique si elle ne le veut pas. Un moment romantique, pour mon petit bout qui ne sait pas précisément comment on fait les bébés, c'est un baiser, un câlin, une danse : ce n'est pas encore la sexualité, mais le respect commence déjà là. Gaston veut épouser Belle sans se soucier de son consentement, tandis que la Bête, au début du film, veut l'obliger à dîner avec lui. Mon mari et moi avons bruyamment exprimé notre dégoût devant le comportement de Gaston et la Bête et le message est passé facilement. Gaston s'est pris des insultes de la part de notre petit bonhomme tout le long du film ("crotte de nez" et "caca boudin"). Les manières impeccables de la Bête à la fin du film ont reçu son approbation.
C'est quand même pas sorcier, elle a dit NON, la dame, un gosse de 4 ans comprend ça très bien ! Mieux que certains énarques, en tout cas. Je ne vais pas briser son innocence en lui expliquant que ce genre de choses peut arriver dans la réalité. Je me borne à ancrer dans son esprit l'importance du respect du consentement, avant que les médias et la société n'interviennent. Par les temps qui courent, ça me parait primordial et tous les outils sont bons à prendre.

3 commentaires:

  1. Jamais vu ce film. Je n'en avais pas vraiment envie, je préférais attendre "Le Beau et la Bête".
    Peut-être que je devrais le voir alors parce que j'imaginais le truc bien sexiste avec la Belle qui est belle mais qui ne peut s'empêcher de tomber amoureuse d'un monstre. Peu importe qu'un homme soit beau ou moche, par contre les filles c'est belle ou ça crève.
    Pour l'instant le seul Disney qui m'ait paru féministe c'est Tania et la Grenouille. Déjà c'est pas une Princesse et en plus elle est noire!

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  2. J'oserais pas prétendre que ce film est exempt de sexisme, surtout avec le sujet de base (le conte de Mme Leprince de Beaumont est gratiné, dans son genre). Je pense qu'il y a moyen de bien s'énerver. Mais il contient des éléments qui, si on insiste dessus, permettent de limiter la casse dans le cerveau d'un enfant de 4 ans. On peut même en tirer un enseignement.
    En tout cas, c'est moins sexiste que Blanche-Neige. Celui-là, j'ai beau chercher en essayant d'être bon public, je ne vois pas comment en tirer quelque chose.

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  3. Dis donc, j'étais passée à côté de cet article. J'ai toujours aimé regarder les Disney un peu comme tu le fais là: avec un oeil "d'analyste critique". Et effectivement, si Blanche Neige (cf comm au dessus^^) n'apporte pas grand chose de ce côté là - mais j'aime ce film, j'avoue :P - d'autres Disney sont porteurs de vrais messages. La mixité sociale (Alladin, la Belle et le Clochard), l'égalité et la tolérance (Toy Story, Rox et Rouky), ou plus récemment les questions écologiques et les dérives du numérique (Wall-E)...ces messages se renforcent il me semble, et s'étendent, depuis le partenariat de longue durée avec Pixar notamment.

    Certes quelques uns des vieux Disney présentent aussi des clichés, mais globalement et du moins dans mes yeux, ces films véhiculent des messages importants sur la société et sur les valeurs humaines.

    Bonne soirée :-)

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