dimanche 25 novembre 2012

25 novembre : changer notre regard sur le viol

Il y a quelques jours, France 5 a diffusé le documentaire Viol, la double peine, basé sur des témoignages de victimes. On y voit clairement la détresse des victimes auxquelles aucune aide n'est proposée : elles sont seules avec leur traumatisme face à une justice qui leur impose de prouver qu'elles sont bien victimes.
Dans le sillage de ce documentaire, le plate-forme Viol, les voix du silence permet aux victimes de donner le témoignage qu'elles n'ont jamais pu faire entendre. Cette plateforme s'ajoute à celle créée il y a deux ans par OLF.
Le Nouvel Obs, de son côté, veut lancer un pavé dans la marre avec un manifeste contre le viol porté par Clémentine Autain, pendant que la Fédération Nationale Solidarité Femmes publie une vidéo pour les 20 ans du 3919.

Si tout le monde parle de viol, ce n'est pas un effet de mode : nous sommes le 25 novembre, c'est la journée de lutte contre les violences faites aux femmes.
C'est donc le moment de déranger le public et de lui rappeler qu'en France, chaque année, plus de 75000 femmes sont violées, que 70000 victimes ne peuvent pas porter plainte, que 16% des femmes subissent un viol ou une tentative de viol au cours de leur vie.
Le viol est donc un phénomène massif et non pas le fait de quelques pervers. Le viol n'est pas "la faute à pas de chance", une femme plutôt jolie qui se trouvait malencontreusement sur le chemin d'un prédateur. Puisque 80% des victimes connaissaient leur agresseur, il faut cesser de considérer que les violeurs sont majoritairement des prédateurs louches-pas-comme-les-autres.

Il faut donc changer notre regard sur le viol.
De la même manière qu'on conviendra que la violence verbale est une violence exercée par le biais de la parole, il faut comprendre que la violence sexuelle est une violence exercée par le biais du sexe, et non pas un désir mal contenu. Le viol n'est donc pas un débordement de sensualité, il n'a pas à être érotisé ni fantasmé.
Un violeur n'est pas un homme qui n'a pas pu se contenir. Le désir sexuel s'éteint nécessairement devant une femme qui crie, qui pleure, qui supplie, ou qui tout simplement n'exprime pas son enthousiasme. Un violeur est un homme qui prend son pied à frapper sa victime là ou il pense la marquer de manière indélébile.
Une femme violée n'est pas une femme souillée. C'est encore moins une femme qui l'a cherché. La manière dont elle était habillée, son comportement ou son taux l'alcoolémie n'autorisent personne à poser la main sur son corps sans qu'elle en ait exprimé clairement le désir. En tant que victime, elle mérite donc toute l'aide qu'on peut lui apporter. Une prise ne charge des victimes serait un minimum. Chercher à démontrer qu'elle porte un part de responsabilité dans l'acte atroce dont elle a été victime est ignoble.

S'il est nécessaire de libérer la parole des victimes pour montrer l'étendue du viol, il faut aussi rappeler (encore !) que ce n'est pas à elles d'avoir honte.
Toute les actions mettent aujourd'hui en avant les femmes : elles avouent avoir été violées, elles rappellent que "non c'est non". Quand seront-elles centrées sur les violeurs ? Quand montrera-t-on que ce ne sont pas des hommes éperdus de désir, mais des égoïstes en mal de domination ? Quand dira-t-on aux jeunes hommes qu'une femme n'est pas un objet à leur disposition au lieu de dire aux jeunes filles qu'elles doivent faire attention à leur tenue, à leurs heures et lieux de sortie et à leur taux d'alcoolémie ?
Quand centrera-t-on les campagnes sur l'importance du consentement ? Sans consentement donné librement, il y a viol ; un consentement obtenu par la force, la menace ou la manipulation n'a aucune valeur. Aujourd'hui, on considère encore que la femme est consentante par défaut, que qui ne dit mot consent : la victime doit prouver à la justice qu'elle a clairement fait comprendre son absence de consentement. Une femme ayant subi un acte sexuel sans avoir pu donner un consentement libre n'ose pas parler car elle doute d'être victime ; si elle arrive à mettre le mot viol sur l'acte, elle peut légitimement douter qu'elle sera considérée par son entourage, les forces de l'ordre et la justice comme une victime et prévoir qu'elle sera suspectée de mystification. Cette absence de considération pour un consentement libre manifesté par une femme visiblement enthousiaste permet à certains accusés de prétendre que la victime était consentante, comme s'il pouvait y avoir le moindre doute.





4 commentaires:

  1. Quelle prise en charge des victimes quand les psys eux-mêmes ont ce même regard et se comportent vis à vis des victimes de la même façon, et abusent de leur pouvoir avec une inhumanité incroyable ??

    Quand ils osent nous taxer de délirantes alors que nous ne faisons que leur raconter les faits ??
    Quand ils nous font ingurgiter des médicaments dangereux pour notre santé et surtout qui ne sont pas nécessaires ??

    Quand ils se contentent de ne regarder que les symptômes et refusent de s'occuper des causes ??

    Quand ils ne se forment pas et ne mettent pas leurs connaissances à jour ??

    De quelle prise en charge des victimes parlent-on??

    C'est un tel scandale !!!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Oui, le problème de la prise en charge des victimes a deux aspects : d'une part il faut pouvoir la proposer gratuitement à chaque victime, d'autre part il faut que cette aide soit adéquate ! Il suffit de lire le blog de Muriel Salmona pour se convaincre que la partie n'est pas gagnée...

      Supprimer
  2. at : Sandrine
    Vous avez récemment suggérer que les mââles féministes fassent autre chose que des processions et protestations ( en fait, c'est là, mon interprétation ou + tôt mon point de vue). On pourrait leur suggérer d'organiser et proposer des groupes d'informations anti-sexistes et sexuelles ludiques ,pour des gamins dans les écoles. Car c'est là, selon les études récentes publiées, que commencent les violences sexistes et sexuelles.
    Pour lutter contre les violences faites au genre féminin, il faut remettre en cause les stéréotypes au moment où ils se propagent et s'ancrent dans les esprits.
    C. de Haas le fait actuellement pour les membres du gouvernement et c'est tant mieux
    Mais la masse de ceux qui risquent de ne jamais réfléchir au problème de la violence faite aux femmes doit être aidée par la déconstruction de ces stéréotypes véhiculés par la tradition et qu'il faudrait déjà commencer à bousculer plus tôt.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Les violences à autrui s'ancrent dans les corps et les esprits dès lors que les adultes, les parents en particulier, commencent à taper le corps de leurs enfants pour les éduquer dès l'âge de 18 mois en moyenne.

      Commençons donc par supprimer le droit de correction des parents sur le corps de leurs enfants et par donner aux enfants leur droit à leur intégrité physique et psychologique. Nous serons au moins un peu cohérents et crédibles auprès de la jeunesse.

      Un enfant n'apprend pas avec des paroles mais avec son vécu.

      Quand les enfants seront respectés dans leur corps et leur esprit, ils respecteront le corps et l’esprit d’autrui, sans aucune difficulté.

      Supprimer

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.