dimanche 26 décembre 2010

Féministe ? Quand ça m'arrange !

Je ne connais pas grand-monde qui sache ce qu'est le féminisme.
Il y a celles et ceux qui rejettent le féminisme parce que ça finit en -isme ou parce que le nom leur fait croire que c'est juste contre les hommes (et l'essentialisme ? c'est contre le diesel peut-être ?) : c'est plus facile que se renseigner, se cultiver et réfléchir.
Il y a celles et ceux qui se réclament du féminisme pour mettre en avant les femmes dont les qualités intrinsèques devraient sauver le monde : un contresens.
Et puis il y a celles et ceux qui reprennent à leur compte les idées féministes pour combattres les inégalités les plus flagrante (mais pas les autres), pas toujours en osant se qualifier de féministes, et seulement quand ça les arrange. Un article récent des Nouvelles News dénonce ce phénomène.

Ce n'est pas un phénomène récent. Lors du débat sur l'interdiction du voile à l'école : on nous parlait jusqu'à la nausée de la liberté des femmes, sans parler de toutes les autres oppressions que nous subissons dans toutes les catégories sociales. Les violences sexistes, les inégalités de salaire ? Silence radio. On ne m'ôtera pas de l'idée que pour certains (pas tout le monde, peut-être pas la majorité des gens), l'égalité des sexes n'était qu'une excuse pour exprimer leur islamophobie.
Et ça continue... On a eu droit à la dénonciation de la polygamie (pourtant, quand un "bon Français" a des maîtresses, le seul commentaire que ça provoque, c'est "quel homme !"), au débat sur le voile intégral, et en ce moment, le NPA se fait tacler pour avoir osé présenter une candidate portant un foulard aux élections régionales. Dans la plupart des articles que j'ai lus sur le sujet, l'auteur ne prend même pas la peine de citer le nom de la candidate en question, c'est dire si sa liberté d'exister les intéresse.
Si seulement les violences sexistes faisaient couler autant d'encre que ce que les femmes portent ou non, ce serait un véritable progrès pour l'égalité des sexes. A part chez Ni Putes Ni Soumises qui mène un vrai combat, cette propention à ne dénoncer médiatiquement le sexisme que quand il frappe les musulmanes ressemble plus à du racisme qu'à un véritable souci pour les femmes concernées.

Et puis il y a eu l'Afghanistan. Pendant des années on a laissé les Afghanes se faire enfermer dans leurs burkas, lapider, pendre... dans l'indifférence générale. Et du jour au lendemain, quand il a fallu justifier une guerre, on nous a parlé d'elles. Mais si leur sort intéressait vraiment les politiques, il fallait y aller plus tôt !

Le comble est atteint avec l'affaire Assange.
Combien de viols dans le monde ? Combien en France ? Et dans les pays en guerre ? Qui parle du cas de l'Afrique du Sud, par exemple ?
Mais quand il s'agit d'un Robin des Bois de la vérité comme Julian Assange, d'un type qui a donné un coup de pied jubilatoire dans la fourmillière du mensonge d'Etat, en y mettant les formes en plus (en collaborant avec les journaux du monde entier pour éviter de mettre des gens en danger), là, ça fait causer.
Evidemment, le timing des plaintes est troublant. Est-ce une raison pour à discréditer les plaignantes ? Pour jouer sur les termes de l'accusation pour nier ou minimiser le viol ? On ne pourrait pas laisser la justice travailler tranquille, il faut vraiment que chacun se permette de donner son avis sur la bonne manière de violer une femme ?
Si encore tous les viols étaient à l'origine d'un tel emballement médiatique, et d'une telle mobilisation de moyens pour arrêter le suspect... Mais lorsque l'on lit le J'Accuse de Noami Wolf publié par le Huffington Post, repris par Maïa Mazaurette et traduit intégralement par Hypathie, on a la nausée. Tant d'horreurs sont commises au vu et au su de tout le monde, sans que personne ne réagisse...
A noter que chez Emelire vous trouverez une savoureuse caricature sur le sujet.

Défendre les droits des femmes ? D'accord, mais seulement quand ça arrange les hommes au pouvoir. Sinon vous pouvez aller vous brosser. Le féminisme n'est bon que quand il peut être utilisé par les hommes.

4 commentaires:

  1. Il n'y a qu'à voir le désolant classement du Nouvel Obs sur le look des politiques. Ces dames sont gâtées en termes de clichés sexistes. Les engagements sincères en faveur des femmes et du respect de leur droit sont souvent le reflet de quelque effet de manche relevant davantage de l'opé de com. A nous de poursuivre et de rester constructives pour faire avancer les choses et les mentalités ! Anaïs Misfits

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  2. Bien d'accord : qu'on commence par appliquer et faire appliquer les lois qui existent chez nous (et dont les décrets d'application sont publiés, puisque certaines lois ne voient jamais arriver de décrets d'application) et dans l'hémisphère Nord avant de donner des leçons de morale au monde entier ! Merci pour le lien.

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  3. On nous réduit à notre "vie sexuelle" même quand il s'agit soi-disant de nous "défendre". En effet, question égalité des salaires et voix au chapitre dans les décisions politiques qui nous concernent, silence de mort. Pour nous inscrire dans le débat, ILS parlent maintenant de viol, de lapidation et de persécutions en tout genre. En les instrumentalisant à leur profit, bien sûr.

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  4. @ Anaïs : Toute la difficulté est de dénoncer les abus sans donner l'impression qu'on n'est pas contente que les droits des femmes soient, même ponctuellement, mis à l'honneur. On râle, on râle, mais si Assange est bien coupable, il faut le condamner et cette débauche de moyens aura été utile.

    @ Hypathie : de rien, c'est moi qui te remercie pour cette traduction !

    @ Euterpe : c'est très juste. Tout tourne encore autour de notre corps, de ce qu'on porte, de qui nous pénètre, et comment.

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