Mon projet pour l'avenir ? Etre vieille.
Etre vieille, déjà, ça veut dire qu'on est vivante. Je ne tiens pas à me suicider avant mes 40 ans ni à être emportée par un cancer à 45 ans. Je veux atteindre la cinquantaine, la soixantaine. Après, on verra.
Ah, la vieillesse... Je ne comprends pas pourquoi les magazines féminins veulent absolument la bannir. C'est beau, la vieillesse.
Arborer ce visage ridé, témoin des rires et des rages passées. Porter
au creux de ses joues et au coin de ses yeux les stigmates du bonheur.
Toucher du doigt, sur son front, les sillons laissés par l'inquiétude,
l'étonnement ; entre ses yeux, la profonde marque de la colère. Montrer
qu'on a vécu, qu'on vit, loin des visages lissés au botox des actrices
aux yeux aussi expressifs que des épagneuls bretons.
Avoir la peau
qui perd de sa fermeté, sentir dans la paume de sa main la joue
attendrie de l'être aimé. Permettre à l'enfant adoré de se nicher au
creux de ce corps doux, chaud, aux aspérités adoucies.